les 100 mots de Rimbaud : « Eternité »

Rimbaud a 17 ans et demi quand il adresse à Jean Richepin la première version de ce poème, datée de « mai 1872 ». La deuxième apparaît dans le chapitre « Alchimie du Verbe », insérée durant l’été 1873 par Rimbaud lui-même dans son recueil Une saison en enfer*, dont il confie l’impression à l’Alliance typographique de Bruxelles*. La troisième nous vient de la transcription livrée par Verlaine*, publiée dans La Vogue de juin 1886 à l’insu de Rimbaud, qui vit alors dans la Corne de l’Afrique. Les trois versions, bâties selon la même structure de six quatrains, présentent certaines différences. Modifications volontaires et accrocs de mémoire. Rimbaud interpelle-t-il L’Éternité avec un « L’ » capital et apostrophe comme dans son envoi à Richepin, ou « Éternité » sans article dans la copie manuscrite de Verlaine, ou encore sans aucun titre comme il l’immortalise dans Une saison en enfer ? Entre autres variantes, Rimbaud aura semble-t-il préféré à « la mer allée/ Avec le soleil » de la première et de la troisième versions connues, « la mer mêlée/ Au soleil » qu’il fixe dans sa forme ultime de 1873.

Dans ce poème, certains voient un appel lancé à Verlaine qui vit encore avec Mathilde ( Mauté de Fleurville). D’autres y lisent une quête moins pragmatique : en se perdant, l’homme a perdu l’éternité promise au paradis terrestre ; Rimbaud traduit l’infini dans la mer mêlée au soleil, et trouve l’éternité dans la permanence de la nature, dans l’éternel retour de la nuit et du jour. Interprétations multiples laissant entière l’énigme de ce poème, qui offre aux commentateurs l’heur de se perdre en conjectures. Seul Rimbaud en aura su le véritable sens.

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