les 100 mots de Rimbaud : « Femmes »

L’omniprésence de Verlaine* dans la vie de Rimbaud éclipse les femmes qui l’ont accompagné.

La Daromphe d’abord, Vitalie Cuif, qui lui donne le jour. Leurs rapports tendus marquent d’une empreinte bien injuste cette mère abandonnée par son mari, qui élève seule deux filles et deux garçons. La paysanne ardennaise, dure, âpre au gain peut-être, finance la première impression d’Une saison en enfer* (1873), rejoint son fils à Londres ( Leun’ Deun’) quand il l’appelle, et reste en lien épistolaire fidèle avec lui pendant ses années africaines. Certains attribuent à sa sévérité l’esprit rebelle de Rimbaud : on s’en féliciterait !

Il y a Victorine, première petite sœur, qui disparaît le mois suivant sa naissance, et ses deux autres sœurs, Vitalie et Isabelle. Vitalie meurt à 17 ans. À cette annonce en 1875, Arthur rentre à Charleville ( Charlestown) et se rase le crâne en signe de douleur. Quant à Isabelle, elle le veillera à Marseille* jusqu’à son souffle ultime.

Il y a aussi ses muses de jeunesse qui lui inspirent de belles pages, muses réelles, muses imaginaires : la « pâle Ophélia », belle comme la neige, « La Maline », « faisant de sa lèvre enfantine, une moue », « Les Mains de Jeanne-Marie », « qui ne font jamais mal », et Vénus et Nina. Rien ne dit que ses rêves romantiques ou charnels aient trouvé d’heureuses conclusions, même si son ami Delahaye* cite un tête-à-tête amoureux sur la place de la Gare, ou encore cette relation avec « la fille des ouvriers d’à côté », comme d’autres tendres rendez-vous à Paris où l’aurait suivi une petite amoureuse. Ils dorment sur un banc, et au petit matin il la renvoie. Sans parler de son amour du corps des femmes, qu’il décrit à merveille dans ses poèmes. Il y a encore cette veuve milanaise « très accorte », qui l’héberge un mois entier chez elle, en 1875, à Milan ( Italie). Enfin, ces femmes de confort en Éthiopie, et en particulier Myriam, jeune chrétienne abyssine, dont certains dignes témoins confirment la liaison à Aden et Harar* de 1884 à 1886. Françoise Grisard, gouvernante d’Alfred Bardey*, lui donne des leçons de couture, la dit fine, douce et belle, cheveux noirs impeccablement nattés, assure que Rimbaud la traite avec égard, veut l’instruire et l’épouser. Simple présence contre la solitude ? Quelques mois passent, il a « eu assez longtemps cette mascarade sous les yeux », comédie des sentiments qu’ils se jouaient tous deux. Il « répudie » Myriam avec quelques thalers, moins préoccupé d’amour que de fusils, et rêve cependant de mariage, d’un fils qu’il éduquerait à sa façon. Il interroge alors la femme de sa vie, sa mère : « Pourrais-je venir me marier chez vous, au printemps prochain ? […] trouver quelqu’un qui consente à me suivre ? » Suivre Rimbaud…

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