les 100 mots de Rimbaud : « Le Dormeur du val »

« La vraie beauté ne se rencontre que dans la souffrance […], voilà pourquoi mon duelliste mourant est beau », écrit Gustave Courbet au sujet de son tableau L’Homme blessé. Le poème de Rimbaud « Le Dormeur du val » tient de cette esthétique et de cette souffrance. Esthétique dans la structure poétique – sonnet, alexandrins, rimes –, somme toute assez convenue au regard de la modernité qu’il développera plus tard. Souffrance que le poète amène en une conclusion des six mots du dernier vers assénée comme un couperet, après avoir tissé un décor naturaliste idyllique, accueillant et omniprésent : verdure, rivière, herbe, soleil, montagne, val, mousse, rayon, cresson, nue, lumière qui pleut, glaïeuls, parfums… Des vers ponctués de couleurs : argent, bleu, pâle, vert et rouge. Une nature bouillonnante où finit la vie par l’innommable mort. Rimbaud a 16 ans. Outre l’art poétique, il maîtrise déjà l’art de la dramaturgie et conduit de manière adroite le lecteur du dormeur au gisant.

De ce sonnet s’élève un cri de révolte contre l’horreur de la guerre qui frappe à quelques kilomètres de chez lui et fauche la jeunesse, « un soldat jeune », aussi jeune que Rimbaud. « Le Dormeur du val » est le deuxième poème du second des Cahiers de Douai ( Douai) daté d’octobre 1870, poème parmi les plus connus de Rimbaud et que chanteront entre autres Jean-Louis Aubert, Jacques Douai, Léo Ferré, Yves Montand, Serge Reggiani, Sapho, et en allemand Klaus Kinski : « Der Schläffer im Tal ».

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